L’article 1792-6 du Code civil définit la réception comme « l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. »
La réception peut être expresse par la signature d’un procès-verbal de réception ou tacite.
La Cour de Cassation rappelle dans cet arrêt que réception tacite de l’ouvrage est caractérisée par la volonté non équivoque des maîtres de l’ouvrage de l’accepter.
Il est de jurisprudence constante que cette volonté non équivoque des maîtres de l’ouvrage est présumée lorsque deux critères cumulatifs sont réunis :
- la prise de possession de l’ouvrage,
- le paiement de l’intégralité des travaux.
L’inachèvement des travaux n’empêche donc pas de retenir l’existence d’une réception tacite.
De la même façon, il peut y avoir réception tacite avec réserves, lorsque des malfaçons sont dénoncées par les maîtres de l’ouvrage lors de la prise de possession.
L’arrêt du 7 novembre 2024 de la Cour de Cassation (n°23-13283) porte sur la question de l’existence d’une volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir les travaux en présence de :
- travaux inachevés (abandon de chantier) et,
- une déclaration de créance au passif du constructeur correspondant au chiffrage des travaux de reprise listés dans un procès-verbal de constat d’un Commissaire de Justice.
La Cour de Cassation a ainsi écarté la réception tacite considérant que n’était pas caractérisée la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir les travaux dans leur état d’avancement à la date de l’abandon du chantier.
Cour de Cassation, Chambre Civile 3ème 7 novembre 2024 n°23-13283 :
« Vu les articles 1er de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 et 1792-6 du code civil :
La retenue de garantie et la caution solidaire qui peut s’y substituer, prévues par le premier de ces textes, ont pour but de protéger le maître de l’ouvrage contre les risques d’inexécution ou de mauvaise exécution des travaux de levée des réserves à la réception (3e Civ., 22 septembre 2004, pourvoi n° 03-12.639, Bull. 2004, III, n° 154 ; 3e Civ., 7 décembre 2005, pourvoi n° 05-10.153, Bull. 2005, III, n° 238).
Il résulte du second que la réception tacite de l’ouvrage est caractérisée par la volonté non équivoque des maîtres de l’ouvrage de l’accepter.
Pour constater l’existence d’une réception tacite avec réserves au 22 juin 2015 et libérer la caution au profit du maître de l’ouvrage, l’arrêt relève que le constat d’huissier de justice du 27 avril 2015 faisait état d’un abandon de chantier, d’inachèvements et de non-façons et retient qu’aux termes de la déclaration de créance transmise le 22 juin 2015, qui s’analyse en une demande en paiement, la société RTPP sollicitait l’inscription au passif de la société Thermeos de la somme correspondant aux chiffrages des reprises listées dans ce constat, de sorte qu’elle avait manifesté à cette date sa volonté non équivoque de recevoir les travaux inachevés avec réserves.
En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir les travaux dans leur état d’avancement à la date de l’abandon du chantier, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »