Dans un arrêt du 6 juillet 2023, la Cour de Cassation a, au visa de l’article L 113-1 du Code des assurances, rappelé qu’une clause d’exclusion n’est pas limitée lorsqu’elle vide la garantie de sa substance, en ce qu’après son application elle ne laisse subsister qu’une garantie dérisoire (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 juillet 2023, 21-24.039).
Dans un second arrêt du même jour, la Cour de Cassation a réaffirmé qu’une clause d’exclusion n’est pas formelle lorsqu’elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite une interprétation (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 juillet 2023, 22-12.830).
Ces arrêts portent sur l’application de la garantie couvrant les pertes d’exploitation pendant la période de Covid.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 juillet 2023, 21-24.039 :
« Vu l’article L. 113-1 du code des assurances :
Il résulte de ce texte que les clauses d’exclusion de garantie, qui privent l’assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque, doivent être formelles et limitées.
Une clause d’exclusion n’est pas limitée lorsqu’elle vide la garantie de sa substance, en ce qu’après son application elle ne laisse subsister qu’une garantie dérisoire.
Pour statuer comme il le fait, l’arrêt retient que les risques épidémiques évoqués par l’assureur, susceptibles de ne toucher qu’un seul établissement au sein d’un département et ainsi mobiliser la garantie, comme la listériose, la salmonellose ou la légionellose, qui ne sont pas des maladies transmissibles interhumaines, à l’inverse de la peste, du choléra, de la variole ou de la Covid-19, n’entrent pas dans le champ de la définition de l’épidémie et que d’autres risques épidémiques comme la fièvre typhoïde et la gastro-entérite constituent des événements garantis par ailleurs en cas de fermeture de l’établissement pour cause de maladies contagieuses.
Il ajoute que le cas théorique d’un éventuel « cluster » de l’épidémie de Covid-19 isolé et limité à un seul établissement dans un même territoire départemental, évoqué par l’assureur et qui permettrait l’application de la garantie, est purement fictif et n’est pas avéré à ce jour.
Il en déduit qu’au regard de l’absence de risque couvert par la garantie des pertes d’exploitation en cas d’épidémie, la clause d’exclusion vide de sa substance la garantie souscrite par l’assuré et n’apparaît pas limitée.
En statuant ainsi, alors que la garantie couvrait le risque de pertes d’exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication, de sorte que l’exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d’exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenue dans d’autres circonstances que celles prévues par la clause d’exclusion, n’avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 juillet 2023, 22-12.830 :
« Vu l’article L. 113-1 du code des assurances :
Il résulte de ce texte que les clauses d’exclusion de garantie qui privent l’assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées.
Une clause d’exclusion n’est pas formelle lorsqu’elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite interprétation.
Pour dire que l’assureur doit garantir la société SRP Saint Rémy des pertes d’exploitation subies à la suite des fermetures administratives ordonnées en raison de l’épidémie de Covid-19, l’arrêt, après avoir rappelé les termes de l’extension de garantie et ceux de la clause d’exclusion, retient, d’abord, que cette clause qui fait référence à la clause de garantie en ce qu’elle vise « une cause identique », ne peut être dissociée de cette dernière, et que, même si elle ne figure pas dans la clause d’exclusion, la notion d’épidémie, dont l’ambiguïté est invoquée par l’assuré et qui est employée dans la clause de garantie, affecte nécessairement le caractère formel de la clause litigieuse puisqu’elle est un élément constitutif de l’exclusion de garantie dont l’application est revendiquée par l’assureur.
11. Il énonce ensuite que la définition du terme « épidémie » avancée par l’assureur, qui réfute la contagion et l’impact sur une population étendue comme données constantes de l’épidémie, ne correspond pas à celles des dictionnaires qui retiennent au contraire, de manière commune, comme caractéristique de l’épidémie, la propagation à une population étendue, cette dernière acception étant la plus usitée dans la population.
Il ajoute qu’en raison de l’ambiguïté de la notion d’épidémie à laquelle se réfère la clause d’exclusion, celle-ci n’est pas conforme aux exigences de l’article L. 113-1 précité et retient que, dès lors que la notion d’épidémie n’est pas définie dans la police d’assurance, alors qu’elle n’est pas entendue dans le même sens par les deux parties, le contrat d’assurance, qui est un contrat d’adhésion, doit s’interpréter, dans le doute, contre l’assureur qui l’a proposé.
Il déduit, enfin, de la nécessité d’interpréter le terme « épidémie », l’absence de caractère formel de la clause litigieuse.
En statuant ainsi, alors que la circonstance particulière de réalisation du risque privant l’assuré du bénéfice de la garantie n’était pas l’épidémie mais la situation dans laquelle, à la date de la fermeture, un autre établissement faisait l’objet d’une mesure de fermeture administrative pour une cause identique à l’une de celles énumérées par la clause d’extension de garantie, de sorte que l’ambiguïté alléguée du terme « épidémie » était sans incidence sur la compréhension, par l’assuré, des cas dans lesquels l’exclusion s’appliquait, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »