
L’action en justice peut-elle dégénérer en abus de droit ?
L’abus de droit est le fait, pour une personne, de commettre une faute par le dépassement des limites d’exercice d’un droit qui lui est conféré, soit en le détournant de sa finalité, soit dans le but de nuire à autrui (définition – Fiche orientation DALLOZ).
Agir en justice est un droit fondamental reconnu à toute personne disposant de la capacité à agir.
L’exercice du droit d’ester en justice ne peut, à lui seul, donner lieu à une condamnation à des dommages-intérêts.
En revanche, dans certaines circonstances particulières constitutives d’un abus, la faute du justiciable peut être retenue et, sa responsabilité engagée sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.
Il peut en effet être considéré par les Juges que le demandeur/l’appelant a commis une faute faisant dégénérer en abus le droit d’agir en justice et d’exercer une voie de recours. Ce dernier sera alors condamné à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive (voir notamment les articles 32-1, 559 et 628 du Code de procédure civile).
Dans un arrêt du 13 février 2025, la Cour de Cassation a rappelé qu’une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu’il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l’infirmation dont sa décision a été l’objet en appel.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 13 février 2025, 22-23.003 :
« Vu l’article 1240 du code civil :
Une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu’il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l’infirmation dont sa décision a été l’objet en appel.
Pour condamner M. [U] au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, l’arrêt relève qu’il a entrepris une procédure de liquidation d’une astreinte alors que M. et Mme [W] s’étaient déjà en grande partie exécutés et avaient sollicité l’autorisation de pénétrer sur son terrain pour faciliter l’achèvement du rétablissement de la clôture, autorisation qu’il avait refusée sans aucun juste motif ni aucune logique.
L’arrêt retient que M. [U] a agi avec une légèreté blâmable.
En statuant ainsi, sans caractériser l’existence de circonstances particulières justifiant que l’action de celui-ci, qui avait été reconnue légitime par la juridiction de premier degré, soit constitutive d’un abus de droit, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »