Dans un arrêt du 22 juin 2023 (n°22-16748), la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation a rappelé que seuls les désordres existants à la réception peuvent faire l’objet de réserves.
L’effet de purge attaché à la réception sans réserve ne concerne en effet que les défauts et désordres existants et apparents à la date de la réception.
Dans le cas d’espèce, des locaux à usage crèche vendus en l’état futur d’achèvement à une commune avaient été inondés en cours de chantier lors de fortes pluies.
Le réseau d’évacuation des eaux du patio de la crèche à l’origine de l’inondation et les dommages consécutifs avaient été réparés avant la réception, de sorte que la réception des travaux avaient donc été prononcée sans réserve.
La question portait donc sur les préjudices en lien avec l’inondation qui n’avaient pas encore été indemnisés en totalité.
Il résulte de cet arrêt que lorsque les désordres ont été réparés à la date de la réception, le maître d’ouvrage n’a pas à formuler de réserve à la réception, et ce même si l’ensemble de ses préjudices consécutifs à ces désordres n’a pas encore été indemnisé.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 22 juin 2023, 22-16.748 :
“La société Icade fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable sa demande de garantie contre la société Bec, alors « que la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves et que seuls les désordres existants à la réception peuvent faire l’objet de réserves à cette occasion, ceux qui ont été repris avant la réception ne pouvant par définition même donner lieu à des réserves puisqu’ils n’existent plus au jour de la réception ; qu’en considérant que la demande de garantie formulée contre la société Bec construction sur le terrain de la responsabilité de droit commun à raison de l’inondation survenue le 1er novembre 2011, avant la réception des ouvrages extérieurs survenue le 20 décembre 2011, était irrecevable pour cela que la société Icade promotion, qui connaissait le sinistre du 1er novembre 2011 et sa cause, n’avait pas formulé à la réception de réserves sur le réseau d’évacuation des eaux de pluie, peu important de savoir si, comme le faisait valoir la société Icade promotion, le désordre avait été déjà repris à la date de la réception, une réserve devant néanmoins être formulée « obligatoirement » même en pareil cas, la cour a violé l’article 1147 (devenu l’article 1231-1) du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Pour déclarer irrecevable la demande de garantie formée par la société Icade contre la société Bec, l’arrêt retient que le vice affectant le réseau d’évacuation des eaux du patio devait obligatoirement faire l’objet de réserves afin de permettre à la société Icade de solliciter, sur le fondement de la garantie décennale et, le cas échéant, sur un fondement contractuel, la garantie de la société Bec, peu important que le désordre ait été réparé.
En statuant ainsi, alors que seuls les désordres existants à la réception peuvent faire l’objet de réserves, la cour d’appel a violé le texte susvisé.”